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 Les vendanges amères

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Theognis
L'Eclat de Prométhée
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Theognis


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MessageSujet: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeLun 12 Oct - 0:10

S'ouvre devant leurs yeux le domaine du vignoble d'Arquian, quand leurs chevaux gravissent les contreforts d'une motte de terre. A flanc de colline, s'étirent les coteaux sous la couleur sombre des nuages vagabonds. Sur la plaine, les rangs bien taillés gonflés de raisin mûrs se dressent à perte de vue, gardés par des noisetiers à la haute silhouette.

Les hommes s'affairent, le corps râblé, les mains grandes et habiles. Ils chantent les bonheurs d'un repas abondant pris en table commune, généreusement arrosé des fonds de cuve de la saison passée. Au moins la présence de ces gens de ferme, inventeur des trésors de la vigne sous leur lame courbée, pourra-t-elle rassurer Breiz sur les intentions du Baron. Il a la mine sombre et les yeux gris, alors que le bonheur s'étale devant ses yeux. Facile de se noyer dans l'oubli des plaisirs, mais quand les mauvais souvenirs reviennent ce sont les couleurs du jour qui déclinent et le froid qui revient. Breiz, la jeune mère, il l'a désirée, dès qu'il a vu son cheval brillant franchir les portes d'Arquian. Sa visite à l'improviste annonçaient des yeux à caresser, un souffle à boire et un parfum à savourer dans l'intimité d'une chambre aux murs épais. Son corps nu contre le sien, ses cuisses blanches et ses lèvres rosées, voilà ce que désirait Théo en l'invitant à manger dans la salle de banquet.
Mais la jeune mère tient son fils en ses bras, et elle est tout amour pour lui. Alors, les réflexions s'ancrèrent aux pensées tourmentées du châtelain, creusant les parties sombres qu'il veut toujours cacher aux yeux du monde. La Dame a déchiré le voile de sa joie, et son coeur soudain s'est empli d'un sang noir comme la nuit. Les blessures reviennent le hanter, et son cheval le porte plus qu'il ne le mène, un bon cheval qui prend soin de son cavalier. Alors, puisant ces forces dans la puissance de sa monture, il tourne un visage aux yeux troublés vers Breiz et lui dit d'une voix sans timbre:


Breiz....Je voudrai te parler d'Aelyce....Elle est partie et je ne sais que faire pour la protéger de moi, des bandits et de sa folle témérité....

Une clameur s'élève....Un homme, s'étant relevé des rangs pour soulager ses reins, a vu le châtelain juché sur la motte de terre. Alors tous s'écrient, pour le saluer, et agitent leur chapeau de paille avec frénésie. Théo leur répond d'un signe de la main, se forçant à sourire, bien qu'ils ne puissent pas le voir.
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Breiz
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeLun 12 Oct - 1:06

Qu'elle haïssait cette selle amazone! Qu'elle haïssait la bienséance, parfois! Elle aurait du la jeter aux orties, la bienséance, et laisser la selle aux écuries d'Arquian le temps de la promenade. A cru, il était plus facile de diriger Sombre.

Elle avait solidement noué l'écharpe dans laquelle elle portait son fils, et y avait calé l'enfant. La promenade s'annonçait agréable en cette fin d'automne. Hissée sur la selle, jambes calées dans les fourches, elle avait mis le palefroi au même pas que celui de son hôte. Ils avaient pris la direction des vignobles. Les vignerons d'Arquian étaient encore au travail, courbé entre les rangs de vigne. Eux, sur leurs chevaux, dominent la plaine. Théo, à sa gauche puisqu'elle n'est pas une princesse, auxquelles est réservée la monte à droite, semble perdu dans ses pensées. Alors elle se tait, elle aussi, respectant le silence de son hôte. Fredonnant tout juste, pour Gauvain, comme elle le fait souvent. Savourant la tiédeur du soleil qui réchauffe son dos, à travers la lourde robe noire.


Breiz....Je voudrai te parler d'Aelyce....Elle est partie et je ne sais que faire pour la protéger de moi, des bandits et de sa folle témérité....

Plus que la phrase elle même, c'est le ton, neutre, détaché, qui l'inquiète. Détachant brusquement son regard de la vallée, elle se tourne vers lui. Se plonge dans les ombres qui habitent son regard.
Jusqu'à ce que la clameur montant des vignobles ne la fasse tourner la tête, à nouveau.
Et ce sourire! Ce sourire qui ne reflète aucune joie. Aucune fierté. Le Baron qu'il était aurait du se gargariser d'être autant aimé de ses hommes.
Réagir. Vite, avant que la fêlure à l'âme de Théo ne le fasse voler en éclats.
Elle entonna la chanson qu'elle fredonnait plus tôt à l'oreille de son fils, à pleine voix, en direction des vignes et de leurs travailleurs.


Au pied d'une vigne
J'ai reçu le jour;
Ma mère était digne
De tout mon amour.
Depuis ma naissance
Elle m'a nourri,
En reconnaissance
Mon cœur la chérit.


Bien sur, tous la connaissaient, et ils reprirent en coeur dès le deuxième vers. La jeune veuve les salua depuis son poste d'observation, dans un grand geste du bras.
Et, tandis que tous, en contrebas, braillaient le premier refrain à pleins poumons, elle effleura la croupe de son cheval du bout de la cravache. Le palefroi, réagissant au quart de tour, poussa de l'épaule son confrère, maintenant les cavaliers botte à botte. Enfin, genoux à mollets, vu la position imposée à la cavalière. D'une ferme et constante pression, Sombre fit pivoter son voisin. Et les deux chevaux emportèrent leurs cavaliers loin de la joyeuse scène campagnarde.
Cherchant toujours une réponse à la question muette de Théognis, la jeune femme regarda autour d'elle. Il devait tout de même bien y avoir un endroit dans cette baronnie où l'on puisse se promener sans tomber sur quelqu'un, non?
Posant une main sur l'avant bras de celui qu'elle considérait comme un ami, depuis longtemps, elle murmura :


Je l'ai appris il y a peu, Théo... Par hasard...

Oubliant que son genou, que sa cheville frôlaient le corps d'un homme, oubliant que cela ne lui était pas arrivé depuis la mort du PiYre, voir depuis la naissance de Gauvain, elle ajouta :

Sais-tu au moins pourquoi elle a fui Arquian?

Ils étaient arrivés au bas de la colline. Quittant volontairement le chemin, la jeune femme poussa son cheval à travers les pâturages, déserts à cette heure du jour. Celui de Théo, bonne âme, resta collé à Sombrelance.
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Theognis
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeMar 13 Oct - 12:25

Des brins de luzerne collaient aux sabots des chevaux, ici le champ venait d'être moissonné pour servir de nourriture aux bêtes en prévision de l'hiver. L'air était encore piquant de pollen, mais il n'y aurait personne pour les déranger, à présent. La proximité de Breiz était propice aux idées vagabondes, mais à la fois Gauvain endormi entre les seins de sa mère et la douleur amère en sa poitrine bloquaient toute montée de désir.
De plus, la question de Breiz l'exaspérait. Pourquoi? Des raisons, des arguments, la thèse et l'antithèse, la rhétorique au service de l'amour déçu....Non, il n'y avait pas de pourquoi, il n'y aurait pas de comment, mais Théo préféra réfréner sa colère, les mains crispées sur l'encolure du cheval. Le monde n'était pas constituée de causes et de conséquences, il évoluait au gré d'une infinité de choses sous l'oeil bienveillant du Créateur. A trop chercher les causes, on perdait la raison, la condition humaine n'étant qu'incertitudes, sauf de la mort prochaine. Pourquoi....Vraiment Théo dut prendre une profonde inspiration en regardant la campagne, pour se calmer. En vérité, il se sentait coupable....
Ils parvinrent au centre du pâturage, avec pour seul compagnon le vent jouant dans leurs oreilles, et il se décida enfin à répondre.


Elle est partie....Elle m'a laissé une lettre, sachant que je ne pourrai la suivre, puisque je n'ai pas encore la capacité d'accomplir de longs trajets sans faire peser un risque sur mes blessures. Je ne sais pas où elle est, pas plus que je ne sais où elle compte se rendre. Voir sa famille, probablement? En tout cas, je l'espère, cela voudrait dire qu'elle a gardé une once de lucidité, pour ne pas mettre en péril sa vie et celle de notre enfant.
Mais le monde est troublé aujourd'hui par les guerres. Son père est un Capitaine célèbre, et je ne voudrai pas qu'elle s'enrôle à ses côtés. Mais....Que puis-je faire ici, prisonnier de mon corps qui m'attache à ce château comme Sisyphe au rocher? Je suis totalement impuissant, et elle est si follement libre et si passionnément amoureuse, que je crains le pire pour sa vie. Je suis désemparé, Breiz....


Il coula un regard profond de doutes vers la jeune mère.
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Breiz
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeMar 13 Oct - 14:51

Qu'il était pénible de le voir comme ça!
Au milieu de ce pré, juché sur son cheval, mais affaissé, lui coulant se regard sombre. Les mains crispées que l'encolure du pauvre palefroi qui n'avait rien demandé. Oui, il ne comprenait pas ses questions. Elle, depuis le Languedoc, elle avait épousé le raisonnement plutôt que l'action passionnée. Le questionnement plutôt que la douleur lui broyant l'âme. Quand elle réfléchissait froidement, elle oubliait sa peine.
Gauvain s'était endormi, réveillé, au gré du pas calme des chevaux.
Elle sauta légèrement au bas de son cheval, prenant machinalement appui sur la bras de Théo. Laissant Sombre libre ses ses mouvements, elle déposa son fils et s'avança à pied dans le champ.
Oui, il fallait qu'elle réfléchisse. Qu'attendait-il d'elle? Que voulait-il qu'elle fasse? Que pouvait-elle faire hormis lui prêter une oreille attentive?
Elle se tourna vers, toujours juché sur son cheval.


Même si elle ralie l'armée paternelle, Théo, elle ne combattra pas. Elle porte votre enfant. Outre que ce serait le mettre en danger, chose qu'en général toute mère évite, son père ne le permettra pas. Parce que c'est son père, et surtout, parce que n'importe quel militaire borné et stupide verrait que c'est mettre toute son armée en danger que d'accepter une combattante enceinte jusqu'aux dents dans les lignes.

Réfléchir, toujours, froidement. Faisant fi de la douleur qu'elle infligeait, peut être.

Au pire, elle aidera les infirmières du camp. Au mieux, son père l'enfermera à la maison.
As tu écris à ses amis, es tu certain que c'est sa famille qu'elle rejoint?


Elle s'adossa à un talus, surveillant Gauvain lancé dans l'exploration du pré. Que pouvait-elle faire d'autre? Lancer la Ruse aux trousses de la jeune femme? Elle s'était toujours dit que le mouvement ne devait pas être utilisé pour des raisons personnelles.
Mais ...
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeMar 13 Oct - 16:52

Breiz, sois sûre d'une chose, c'est que je suis totalement dans l'incertitude....

Appuyant de sa botte contre le talus, il regardait le sol, songeur, perdu dans ses pensées. Un gros caillou, délogé de sa gangue de terre, roula sur la blessure de son pied, et il s'assit vite en grimaçant à ses côtés.

Foutues blessures, si j'avais un peu mieux réfléchi avant de me lancer en Champagne, moi....

Soupirant, il observa le ciel gris, les nuages se rapprochaient, dans une heure ou deux la pluie serait là. Si au moins elle avait le pouvoir de laver son âme....Théo posa la main sur le genou de Breiz et plongea son regard noir aux teintes bleutés dans le sien.

Serais-tu capable, toi, de la retrouver? Je ne veux pas forcément qu'elle revienne ici....Du moins, pas maintenant....Mais j'ai peur qu'elle n'attente à ses jours, en se lançant dans quelques folles entreprises....Si tu apprends, dans les jours à venir, la moindre bribe d'information sur elle, pourras-tu me la donner? Moi-même, je ne peux rien faire, ou si peu...
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeMar 13 Oct - 20:30

Elle avait pris la main, posée sur son genou, entre les sienne. Machinalement, elle le massait. Du bout des doigts. Réfléchissant intensément. Allait-elle accepter? Allait elle demander à ses renards de pister une femme enceinte à travers le royaume? Se mordillant la lèvre inférieure, concentrée, elle continuait de pétrir la main de son interlocuteur. Comme une réponse à la douleur muette qu'elle semblait lire dans ses yeux.
Dans un soupir, elle murmura :


Oui, Théo... Je te promets, si par hasard un de mes renard apprend quoi que ce soit, je te tiendrais au...

Du fond un pré, un hennissement strident. Sombre, le regard furieux, fonçait vers Gauvain, accroupi non loin de lui,absorbé dans la contemplation d'une chose cachée par les hautes herbes du talus. Avant que la jeune veuve ne trouve le temps de réagir, le hongre pris de folie piétinait rageusement le sol à quelques centimètres de l'enfant, ses sabots frôlant le bébé trop interloqué pour pleurer.
Quand, une demi seconde plus tard, la rusée atteignit les lieux, prête à tuer son cheval, le palefroi s'était calmé, et éloigné de Gauvain. Qui hurlait à pleins poumons, maintenant. Devant lui, le corps long et déchiqueté d'une vipère.
Plus pâle que la mort, tremblante, Breiz l'enfant contre elle. Incapable, cependant, de l'apaiser tant elle même était choquée.
D'une voix blanche, elle murmura :


Prends le. S'il te plait, prends le un instant!

Et elle lui fourra l'enfant dans les bras. Bien obligée, il lui fallait retrouver son calme avant de pouvoir appaiser l'enfant terrifié.
Jamais, plus jamais elle ne partirait seule avec Gauvain.
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeJeu 15 Oct - 19:29

Le voilà avec un poupon braillant dans les mains, avec des bras et des jambes qui gigotent partout, sur son torse, son cou et son nez. Vie puissante et fragile qu'il tient contre lui, comme un vase. Précieux, le vase. Encore un peu et la vipère ou les sabots du cheval déchaîné auraient brisé cette peau douce comme le jade.

Que faire pour le calmer? Théo le tient à bout de bras et le regarde. Il l'examine sous toutes les coutures ce visage hurlant, qui pleure les yeux fermés. Inutile de se tourner vers sa mère, incapable de se contrôler, vomissant son cœur à ses côtés. Se souvenir du corps de son fils Tancrède, et répéter les mêmes gestes....Mais lesquels? Le faire sauter dans ses bras, espérant le faire rire quand il est rattrapé? Lui donner une tape sur les fesses, pour l'obliger à stopper la musique?Passer une main aimable dans son dos, et le caresser comme on balaie la poussière sur un meuble? Le poser par terre, à ses côtés, attendre qu'il finisse par se calmer? Enfoncer sa tête dans l'herbe tendre, pour étouffer ses pleurs? Blottir sur son épaule la chère tête blonde et, à l'oreille, murmurer la mélodie d'une chanson paillarde, car il est enfant rusé? Le chatouiller ou le bâillonner? Le bercer ou le persécuter? Appeler à l'aide, au secours, à moi? S'en remettre au Très-Haut, et prier en suppliant qu'il se calme? Lui donner à manger?

Oui, voilà une bonne idée! Lui donner à manger....Théo a dans la poche de son vêtement quelques raisins qui trainent....Alors, délicatement, il couche l'enfant sur ses jambes pliées en tailleur, saisit une perle noire entre deux doigts, et presse le jus...Des gouttes de jus de raisin bourguignon tombe sur les lèvres roses du petit mignon.
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeJeu 15 Oct - 20:52

Bin oui, il hurlait.
Il était tranquillement entrain de regarder ce drôle de truc, qui rampait par terre, quand le gigantesque cheval avait déboulé à fond de train et cassé son jouet vivant à grand coups de sabots rageurs. Des gros sabots, en plus, et tout près. Puis Maman l'avait saisi dans ses bras, tremblant. Et ça n'avait fait qu'ajouter à sa panique. Que se passait-il? Où était le danger? Les battements rapides du cœur de Maman, la pression de ses bras sur sa cage thoracique, oui, il y avait du danger. Où?
Mais déjà sa mère le lâchait. Pourquoi? Pourquoi? Hurlant de plus belle, terrifié, il agitait ses poings serrés pour se libérer des mains qui le tenaient fermement, mais qui n'étaient pas celles de Maman.
Et puis, soudain, un geste. Enfin. "on" l'avait blottit. Ça sentait l'homme, ça sentait le cheval. C'était rassurant. Instinctivement, il récupéra le jus de raisin qui coulait sur ses lèvres, et fourra son pouce dans sa bouche, dans la foulée. Sa petite main, d'un geste sur, agrippa l'auriculaire de la main calleuse qui le maintenait. Et, alors qu'il tétait furieusement son pouce, à défaut du sein de sa mère, il s'apaisa.


Furieuse. Voila. C'était ça, elle était furieuse. Après elle même, bien sur. Comment avait-elle pu, une seule seconde, imaginer qu'un pré désert ne serait as dangereux?
Elle s'était éloignée de quelques pas. Se concentrait pour se calmer. Dans quelques instant, il faudrait qu'elle reprenne Gauvain, et fasse cesser ses pleurs qui... Qui s'étaient tu?
Elle se tourna brusquement vers Théognis. Il n'avait pas assommé son fils, au moins? Soupir de soulagement. Non. L'enfant s'était calmé. Il suçait son pouce, blottit sur les genoux du baron.
Plus pâle que jamais, elle se laissa choir près d'eux. Posa une main sur le pied de son fils, parce qu'elle avait besoin de le toucher. Et fondit en larmes.
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeVen 16 Oct - 4:06

Auriculaire dans la main du bébé. Gauvain le tient prisonnier. Des chaînes scellées ne le tiendrait pas mieux. Il ne peut pas s'en dégager. Gauvain le regarde en suçant son pouce, les joues encore mouillées. Parbleu, ce que je déteste les bébés, ils me rendent bêtes, se dit Théo, sans oser l'avouer à la mère dudit abrutisseur. Pendant que son fils l'emprisonne, sa mère serait capable de lui griffer le cou jusqu'au sang.

Au lieu de cela, Breiz vient s'asseoir près d'eux pour éclater en sanglots....Après Gauvain, sa mère....Théo ne sait plus quoi faire. Lentement, avec circonspection, il passe son bras autour du dos de la jeune veuve et la console comme il le peut....Mais que les mots sont difficiles...Alors, il envoie Gauvain en mission, pour se blottir contre ses bras blancs et la réconforter mieux qu'il ne saura le faire.
Une fois libre, cependant, relève la tête et quelques phrases coulent enfin en sa bouche.


Tu as perdu une vie, tu as gagné une vie....Le fruit de tes entrailles fut le plus beau cadeau de ton mari....Mais un piège aussi, car jamais tu ne pourras l'oublier, cet enfant grandira, et tu reconnaîtras, au fur et à mesure, les traits de son père....Son odeur, l'intonation de sa voix, sa façon de marcher....

S'arrête soudain, car il se rend compte que ces mots, loin de vouloir la consoler, ne sont que le reflet de sa propre amertume, alors que son enfant va naître sans lui, et que son premier fils grandit auprès de sa mère....
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Breiz
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MessageSujet: Re: Les vendanges amères   Les vendanges amères Icon_minitimeVen 16 Oct - 19:15

Oui, elle craquait...
Parce que Théognis était la seule personne devant laquelle elle pouvait se permettre de le faire. Il lui glissa son fils, calmé, dans les bras, et elle serra l'enfant contre son sein. Mais ne se dégagea pas de l'étreinte de l'homme.
Meyre rusée. Voilà ce qu'elle était. Infaillible. Immuable. Solide comme un roc. Debout face au vent. Inébranlable.
Elle n'avait pas le droit à l'erreur, pas la droit à la faiblesse. Son veuvage, elle l'avait vécu seule. Sa peine et sa douleur, intériorisée. Parce qu'elle était celle qu'Il avait choisie pour lui succéder, pour former son fils afin qu'il reprenne les rênes au plus vite. Parce qu'il la savait solide. Tel un barrage à tout moment prêt à se rompre, elle tenait bon. Aurait-elle été seule, elle aurait plus facilement vaincu la peur rétrospective qui l'avait assaillie. Aurait-elle été avec les Rusés, ils auraient ri de sa peur.
Il n'y avait qu'ici, au creux de ces bras, qu'elle pouvait craquer. Qu'elle pouvait cesser d'être la mère de tout le monde, et redevenir l'espace d'un instant une jeune veuve paniquée.
Elle resta là, blottie contre lui, son fils pressé contre elle, les larmes silencieuses roulant sur ses joues, bercée par sa voix. Elle ne fit même pas réellement attention à ce qu'il lui disait. Pleurant, simplement, jusqu'à l'apaisement.
Quand, enfin, elle prit la parole, ses yeux étaient secs depuis de longues minutes. Dans le ciel, les nuages s'étaient amoncelés, et les premières gouttes du dernier orage de la saison s'écrasaient autour d'eux.
Elle se dégagea à regret de son étreinte, et murmura simplement :

Merci...
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