Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilDernières imagesRechercherS'enregistrerConnexion
Le deal à ne pas rater :
ETB Pokémon Fable Nébuleuse : où acheter le coffret dresseur ...
Voir le deal

 

 Le Fantôme

Aller en bas 
AuteurMessage
Theognis
L'Eclat de Prométhée
L'Eclat de Prométhée
Theognis


Messages : 607
Date d'inscription : 06/11/2007

Le Fantôme Empty
MessageSujet: Le Fantôme   Le Fantôme Icon_minitimeVen 2 Oct - 17:37

Le fantôme d'Arquian est une fantôme. Son histoire, évidemment tragique, n'est pas celle que les mères racontent à leurs enfants. Les jeunes gens, eux, se la font passer depuis des générations.

L'histoire se déroule sur les Terres d'Arquian, à l'époque une simple seigneurie située sur les contreforts de la Bourgogne. Des vallons emplis de forêts sombres sillonnent le pays, et débordent de l'eau claire des ruisseaux de pluie. Peu à peu, l'humidité a marqué les pierres du castel, de sorte que les gens l'appellent désormais la Forteresse Noire.
La famille des seigneurs du lieu répondit longtemps aux critères légendaires du Moyen-Age sur la bonne lignée, hommes sérieux et femmes pures. Soucieux de la victoire des armes comme de la fertilité de la terre, de l'honneur des batailles comme de la moralité des mœurs, ils guerroyaient souvent sans accroître leur domaine, sans étendre leur domination.
Hélas, les belles lignées finissent par s'éteindre, ou donnent, au cours d'une mauvaise saison, des rejetons abominables en tout. Les fruits pourris s'écrasent par terre, et enfouissent leurs graines malades dans le sol, ce qui contamine les racines de l'arbre vigoureux. Bientôt, ce dernier est de partout attaqué, et succombe, devenant une carcasse de bois sec, aux branches vides. Ainsi, le château aux murailles les plus solides peut s'effondrer de l'intérieur.

A l'époque décrite, le châtelain d'Arquian était un fou de perversité qui collectionnait les crimes comme les femmes, tuant les uns et violant les autres. Les vallons bruissaient de rumeurs sur les spectacles morbides donnés en son château, sous l'œil complice de rares invités. Son train de vie, prestigieux, provoquait de somptuaires dépenses dans des entreprises aussi licencieuses que déraisonnables. Aussi il n'hésitait pas à employer la force pour taxer les habitants du coin et piller les voyageurs de passage. Des hommes brutaux, pareils à des bandits, hantaient les routes comme des vautours assoiffés d'or et de sang. Quelques hommes demandaient le péage, assis à leur guérite, le gourdin posé contre la porte. D'autres attendaient, à une lieue à peine, dans le sous-bois, les voyageurs et, proies désirables, les commerçants, pour les dépouiller brutalement. Parfois, le Seigneur retenait ses hommes, quelques jours, quelques semaines, pour redonner la confiance aux gens de passage, et alors il relâchait ses loups sur le chemin....
Il avait trois filles, d'une première femme morte en des conditions suspectes au troisième accouchement. Le Seigneur d'Arquian n'avait pas voulu se remarier, condamnant ainsi son nom à l'oubli, malgré une flopée de bâtards qui le détestaient tous. Les filles étaient aussi perverses que leur père. L'une s'amusait à voir des cobayes s'accoupler comme des bêtes, dans des orgies sous la contrainte des armes. Ensuite, elle torturait les femmes enceintes, et ajoutait aux souffrances de l'accouchement diverses perversités bien cruelles. Il se chuchotait dans les rues du village qu'elle était stérile....

Très vite, la région le honnit. Chacun évitait d'en parler ou vomissait son nom. Mais la terre, elle, était solide. Perché sur la haute colline, entourée par quelques falaises bien découpées et de profondes douves, le château d'Arquian avait une solide position. Bien des fois, les gens du pays s'organisèrent en jacquerie, parfois aidés par un seigneur voisin. Mais la forteresse demeurait inexpugnable.
Une bande de brigands, composée de membres rusés et peu recommandables, s'intéressa à la richesse d'Arquian. Entretenant son réseau d'amitié, le Baron donnait des fêtes somptueuses, qui attirèrent la convoitise de ces bandits. Mais ils n'avaient aucun moyen de prendre le château par la force d'un siège, et se trouvaient donc réduits aux conjonctures.
Or ils remarquèrent que les soldats du guet, calfeutrés dans leur guérite, ouvraient les portes certains soir à un homme portant sur le dos du gibier. Ce chasseur venait approvisionner la garnison en viande fraîche, contre un bon salaire et quelques avantages. Personne ne se méfiait de lui, au point que les portes s'ouvraient dès son approche, sans qu'il ait besoin de se présenter.
Alors, un soir que le chasseur marchait d'un pas tranquille vers le château, un sanglier sur les épaules, voilà que les buissons bruissèrent de cris et de cliquetis d'armes. Le pauvre bougre était prisonnier, et fut amené à l'écart.
Un homme, d'une semblable corpulence, fut choisi. Il souleva la masse du sanglier dans son dos, et partit d'un pas vaillant en suivant le trajet habituel du chasseur. Il eut à peine le besoin de baisser la tête, comme sous le poids extrême de cette lourde charge, car les gardes ne prêtaient pas attention à ces traits.
Or, le bougre avait un long poignard à la ceinture. Sous prétexte de découper la bête dans la guérite pour montrer ses parties charnues, il sortit son arme et frappa de tout côté.
Pour la petite troupe, c'était le signal. Ils se ruèrent sur la porte laissée ouverte et commirent un carnage. Les hommes d'armes de la place, surpris en pleine ripaille, purent à peine se défendre; la plupart était à moitié nu et courait en tout sens pour échapper aux coups. Les cris fusaient, les ordres et les insultes, les hurlements de rage et les imprécations. Bientôt, ce ne fut plus que des gémissements, des râles agonisants et des supplications. Mais pas un ne furent épargnés. Trop de sang et de haine séparaient ces brigands des hommes de garnison. Pris d'une folie meurtrière, les brigands arrachaient avec les dents les doigts de leur victime, pour leur voler leurs bagues. A coup de pommeau d'épée, ils brisaient les mâchoires, et s'emparaient de leurs dents en or. Partout les épées et les haches s'abattaient et fracassaient les crânes, au centre de la cour coulait une rivière rouge.
La tuerie devint jeu, et le meurtre une perversité. D'un coup de dague, ils tranchaient les oreilles de leurs victimes, pour en faire des trophées. A grandes goulées, ils s'enivraient de bière, puis baissaient leur froc pour pisser sur la tête des moribonds. Ceux encore vivants, malgré leurs supplications, on les entrainait sur la table, et de l'huile bouillante se déversait sur leurs parties génitales. Les cris étaient horribles, les rires, démoniaques. Le diable avait changé de camp....Enfin, ce fut le silence, lourd, épais. L'air devenait difficile à respirer. Partout régnait une odeur de sueur, de sang et de merde.

Un cri vint rompre le silence....Un cri de joie et d'orgueil, venant des hauteurs du donjon....Bientôt, apparurent dans l'encadrement de la porte les hommes aux visages goguenards. Ils entouraient, sinistre escorte, le Baron aux yeux vitreux et ses trois filles, trois jeunes femmes brunes d'une vingtaine d'années qui se tiennent par les mains et pleurent en silence.

Le Baron, si terrible autrefois, dont les gens du pays prononçaient le nom avec des lèvres tremblantes, le Baron maudit, source de larmes innombrables, cruel et sans pitié, cupide et destructeur, le Baron aux pouvoirs d'un Ogre, fait pitié aujourd'hui. Il serre contre lui ses filles en sanglots et porte sur les conquérants un regard suppliant.

"Faites-moi ce qui bon vous semblera, mais laissez mes filles à l'écart de ça!"

Des rires lui répondent, des rires gras, des rires sans compassion. Voilà que le Cruel implore pour ses filles! Lui qui a brisé tant de familles demande qu'on sauve la sienne. Mais les hommes présents, désaltérés de sang, se sentent maintenant très puissants. Ils vont œuvrer pour la Justice, en appliquant une sentence implacable. Déjà, on apporte les chaînes, des mauvais sourires s'allument au coin des yeux injectés de sang. Brutalement, le Baron est séparé de ses filles....Le supplice durera toute la nuit. Sous le manteau d'étoiles, les tortures se succèdent dans une litanie d'horreur. Des votes à main levée décident les innovations des bourreaux. On fouille le château en quête des instruments adéquats, dont certains se trouvent dans la chambre même du châtelain déchu. Au petit matin, le Baron a cessé de crier....Il pend lamentablement sur ses chaînes, bout de viande ensanglantée, qu'un homme perce de son épée, par lassitude.

Les filles n'ont rien loupé de l'affreux carnage sur le corps de leur père. Elles sont attachées par les mains aux parois du donjon, et sous les yeux de leur père, elles ont subi les pires châtiments de ces mâles déchainés. Les larmes ont creusé leurs joues blanches, et le sang a tâché leurs robes déchirées. Elles ont froid.

(la suite bientôt)
Revenir en haut Aller en bas
 
Le Fantôme
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
 :: Les habitants d'Arquian-
Sauter vers: