Une proposition décente...

Le vougier, avec son ton bourru habituel, annonça au Baron qu'Oderay de Volvent voulait lui causer, puis s'en retourna sans attendre de réponses. Avec le temps, enfermé dans ce château par la volonté des villageois, son irritation ne faisait que croître.
Mais Théo ne songeait pas aux conséquences de sa colère. Il ignorait totalement le vougier, qu'il croyait être une brute sans caractère, sans évolution derrière sa carapace de métal. Il avait l'esprit tourné vers la nouvelle arrivante. Elle était venue comme elle lui avait promis. Heureux, il s'habilla en hâte et sortit à la rencontre de la belle aux mèches brunes. Elle tenait encore son cheval à la main en observant chaque pierre des alentours.

Ode! Je suis content de te voir! Tu as fait bon voyage? Les routes qui mènent ici sont étroites et malaisées, pauvre cheval....

Il ne continua pas plus loin sur ce thème, car il se souvint juste à temps qu'il manquait de palefreniers....

Suis-moi, laisse ton cheval à cet arbre, et allons dans mon bureau, boire quelque chose et discuter de nos projets. Tu me diras ainsi pourquoi tu veux t'engager parmi les Dragons d'Arquian, et quelles sont tes capacités au combat, l'éventail des armes que tu maîtrise, etc...

Je le vis arriver non sans un certain plaisir et lui fit un sourire chaleureux à son encontre.

Citation :

Ode! Je suis content de te voir! Tu as fait bon voyage? Les routes qui mènent ici sont étroites et malaisées, pauvre cheval....

Oui très bon voyage, je te remercie et ne t'en fait pas pour le cheval, il a bien franchit les obstacles lui répondis je.

Suivant ses indications, j'accrochais donc le licol de mon étalon à l'arbre et le suivit en l'écoutant parler. L'idée de m'assoir dans une chaise confortable en sirotant une bonne boisson n'était pas pour me déplaire. Je commençais donc à chercher les bons mots sur le chemin qui menait au bureau pour le convaincre. Pourquoi les Dragons d'Arquian? Quelles armes? A cette pensée, je ne pus retenir un sourire amusée, la liste serait longue....

Le temps était doux, sur la Bourgogne, une belle journée d'automne laissant présager de belles vendanges cette année. Sous le fin tapis des feuilles mortes, les pas laissaient traîner un peu de poussière derrière eux et le soleil au zénith n'était pas désagréable.
Le Baron changea donc d'avis.

Continuons sur le sentier, il longe le sous-bois jusqu'aux premières fermes. Ce serait dommage de s'enfermer par si beau temps.

Marchant aux côtés d'Oderay, il l'écouta formuler ses réponses, avec une attention toute particulière.

Au final, il changea d'idée...et après tout pourquoi pas? C'est vrai que le temps était doux et se prêtait à une ballade...

Comme tu le sais, je suis soldat dans l'Ost, et comme tu dois le savoir aussi, les missions ne courent pas vraiment les rues. M'engager à ton service, c'est une façon pour moi d'intensifier mon action dans la défense de ce Duché. Parcourir les chemins à la recherche des brigands, je ne dirais pas que j'aime ça...non, j'adore ça!
Me rendre utile, voilà pourquoi je désire aujourd'hui me joindre à toi. Je me suis renseigner un peu avant de venir et tes valeurs : L'harmonie, l'amitié, la cohésion, l'entraide sont les miennes. Défendre l'opprimé est d'une certaine manière, une façon pour moi d'expier mes fautes d'antan...

Je marquais une courte pause et repris.

Concernant mes capacités au combat, que te dire. Je maitrise l'arc bien évidement mais aussi le combat à l'épée et dague ainsi que le bâton. Combat au corps à corps de préférence...je sais me faire discrète et attaquer par surprise. Je manie aussi la corde et le poison. Je ne vais pas te le cacher, j'ai été élevée dans un clan d'assassin et c'est là que j'ai appris à tuer. De mon enseignement à l'Ost, je me suis formée aux combats en groupes et appris la discipline... Je sais aussi monter à cheval comme tu t'en doute. Enfin, je suis curieuse et j'aime apprendre de nouvelles techniques...

Je le regardais en souriant Y a t'il autre chose que tu aimerais que j'approfondisse?

Ils s'étaient arrêtés. Le Baron, les mains dans le dos, marqua un temps d'hésitation. La franchise d'Ode contrastait avec sa propre attitude. Sa compagnie naissait à peine et un peu de monde pour la remplir était quelque chose de tentant. Mais d'un autre côté, il ne pouvait mentir à Ode pour le simple bonheur de la voir à Arquian. Elle ne venait pas pour faire le nombre, ses motivations étaient sincères.
Aussi, il prit son courage à deux mains et lui répondit:

Ma chère Ode, tes talents au combat et tes talents....Un peu particuliers seraient très utiles aux Dragons d'Arquian. La souplesse alliée à ta rapidité, que je sens dans chacun de tes gestes, est très utile au combat, bien qu'il te manque la force de soutenir le combat à l'épée lourde.

Mais....Tu as des motivations très nobles, la défense de la Bourgogne, la lutte contre les brigands....Mais les Dragons d'Arquian supposent aussi de voyager, de combattre, voire de brigander et de piller....Car si les écus ne sont pas un noble objectif de combat, hélas l'argent est nécessaire à notre survie. Nous ne sommes pas Dragons pour les travaux serviles, à la mine ou aux champs. Si parfois, nous pouvons vendre au marché le produit de la force de nos bras, comme le bois, les fruits ou les poissons, ce n'est pas non plus notre idéal de vie.

Certes, souvent cela sera nécessaire de travailler ainsi, surtout dans les provinces amies de la Bourgogne, ou en Bourgogne même. Là, le brigandage ou le pillage seront strictement prohibés. Mais en dehors....

La regarde plus attentivement

Ode, nous ne sommes pas là pour défendre la Bourgogne, mais pour attaquer ses ennemis ou les ennemis de ses alliés. Nous cherchons l'aventure au bout du chemin, sans savoir souvent de quoi demain sera fait. Es-tu préparée à cela?

La motivation se lisait dans ses yeux, cela ne faisait aucune doute. Alors, que pouvait-il lui objecter? Elle avait à cœur de respecter son engagement à l'Ost, et Théo ne pouvait lui reprocher ceci, malgré toutes les critiques qu'il émettait par ailleurs sur l'armée du duché. Alors, il jeta au loin le caillou qu'il tenait à la main, et lui tendit la main en souriant.

Bienvenue dans les Dragons d'Arquian! Nous sommes une petite compagnie, minuscule même, mais tu trouveras ici de quoi t'entraîner et de perfectionner au combat. Je te présenterai Gorborenne, un compagnon loyal et dévoué.
Tu deviendras coustilleur, quant à lui il passera bucellaire, car il s'est vaillamment battu à Compiègne contre des ennemis bien supérieurs en nombre.
Un homme sera chargé de ton entraînement, nous l'appelons le Vétéran, car nul, sauf lui, ne connait son nom véritable. C'est un homme....Qui a des lubies, mais avec un réel savoir sur le métier des armes et la vie d'aventures.
Revenons maintenant au château, c'est l'heure de déjeuner. La vie ici est sobre et sans luxe, mais la cuisine est simple et bonne.

Inspirant à pleins poumons le bon air de la campagne, même la légère odeur de fumier qui chatouille le nez, Théo invita Ode à le suivre.

Ah, tu as vu le caillou que j'ai lancé tantôt? Il me rappelle l'histoire de ce chef d'armée qui passait dans la région. Honorable, estimé, grand cavalier, stratège hors pair, il dégageait un charisme sans mesure. On disait de lui qu'on pouvait le voir à des lieues à la ronde, tant son armure brillait de mille feux. Il inspirait le respect et la crainte, et notre belle région était en paix grâce à lui.
Un jour qu'il venait à Arquian pour y passer la nuit, simple étape sur sa route, au cours d'un jour banal comme la pluie qui tombait doux, il menait son cheval sans se presser sur cette même route. Or, un gamin, inconnu de tous, vêtu de haillons, était posté sur le talus que tu vois là, un peu plus haut....
Personne ne prêtait attention à lui, le chevalier songeant à son repas du soir, et la garde aux jolies servantes du château. Or, le gamin tenait une fronde dans sa main, armée d'une grosse pierre. Nul ne sut jamais pourquoi il lança son projectile sur le cortège. Mais il atteignit le chef bien-aimé à la tempe, et en tombant de son cheval il se brisa la nuque.
On ne retrouva jamais la trace du gamin, malgré les poursuites lancées contre lui. Naquirent des soupçons, des accusations de trahison, des mensonges. Personne ne comprenait comment un simple gamin avait pu abattre un homme si fort, sans motif apparent. Certains essayaient de tirer profit de sa mort, et furent donc accusés de cet assassinat.
Quelques mois plus tard, la vallée était à feu et à sang. Il fallut beaucoup de temps pour que cessent les massacres et les destructions. La famine fut générale, la misère dura des années, même les curés fuyaient la région. Tout cela à cause du geste d'un enfant....
Surprenant ce que le destin réserve, parfois! Aussi, il faut toujours se méfier de l'inattendu, même si on l'attend.

Ils avaient quitté le chemin de terre pour une route caillouteuse, le château dressait sa masse noire et ils franchirent ensemble le pont-levis.