Le parfum du sanglier

THEO: Vous êtes dure en affaires

DELLA: moi ?....Oh !

Allons si peu, n'est ce pas?
       
Juste un peu alors

Que vais-je faire des Volvent?
        
Leur octroyer Beaumont, que pouvez-vous faire d'autre ?

J'aurai préféré des guerriers
        
Arf...nous n'en avons pas.

Je ne sais meme pas si vous faites du bon vin
        
Ah si, je peux vous l'assurer ! La Princesse Armoria l'apprécie ainsi que sa Grâce Ingeburge et beaucoup d'autres également.

Mais je ne suis ni l'une ni l'autre....Vous auriez pu amener un tonnelet, pour la dégustation
        
Très juste...mais comment pouvais-je savoir que notre discussion allait en venir à une dégustation de vin ?

Parce que vous n'avez guère que cela à me proposer....moue dubitative
        
De fait. Vous marquez un point.
Hum...Beaumont n'est pas loin...Vous pourrez y faire un saut

Et que pourrai-je y faire là bas?
        
Mais goûter le vin, pardi !
Quoique...en fait, je suppose que vous le revendrez. Donc où est l'intérêt d'y prendre goût ?

Oh je ne suis ni grand buveur de vin ni un négociant. Je suppose qu'il servira à mes hommes pour leurs soirées de beuverie

Grimace
C'est vous qui voyez...Mais donc, c'est bien inutile de le goûter. Nous pouvons donc continuer nos négociations sourit

Oh ce n'était pas un prétexte pour les arrêter, simplement une marque d'attention que vous auriez pu montrer à mon égard....Aussi vous ne m'incitez pas à baisser le prix.
Hausse doucement les épaules
        
En aviez-vous seulement l'intention ? Permettez que j'en doute.

Allons, vous manquez singulièrement de persuasion...
Êtes-vous donc sure d'avoir épuisé avec moi tous les recours?
        
Lève un regard amusé
Si j'avais des soldats et des armes, je pourrais peut-être envisagé un siège de votre château...

Oh et vous nous lanceriez des grappes de raisin à la figure? Nous n'avons pas peur de nous tâcher, à Arquian.
Lui rend son sourire
       
Ah mais moi non plus ! Je travaille aux vignes...j'émonde, je cueille aussi...Je n'ai pas peur de me salir...Oh, mon odeur est différente de la vôtre après avoir pressé les raisins au fond des cuves mais...odeur pour odeur, à chacun la sienne.
sourit de plus belle.
Vous devriez un jour, venir travailler avec moi.

Hésite
Le travail des champs n'est pas digne de la noblesse...Maintenant...
Deux doigts lui tapotent le bras jusqu'à l'épaule
Il parait que la viande de sanglier se marie très bien avec les fruits rouges...
        
Question de point de vue, le travail ne rabaisse pas, il valorise celui qui le fait avec coeur.
Suit ses doigts du regard
En effet...sanglier et baies font bon ménage en cuisine. Et rien ne vaut un ragout de sanglier mariné dans un vin miellé.

Sourit, et ses yeux ne quittent pas le visage de la blonde quand ses doigts se glissent sous son menton....Il lui fait face.
C'est une recette que j'affectionne tout particulièrement, et je suis un grand gourmet, vous savez...Vos talents de cuisinière méritent peut-être réflexion sur votre proposition...
        
Frémit malgré elle au contact des doigts sur son visage, recule un peu, prend sa main délicatement et la repose sur la banquette.
Hum...s'il n'y a que cela pour vous ravir, ce sera un plaisir de vous recevoir à ma table !
Lui adresse un sourire satisfait
Disons...une fois la semaine. Cela vous convient ?

Oh une fois par semaine....vous êtes fort généreuse avec moi....
Le sourire accroché au coin des lèvres, observe son trouble, et son visage alors se glisse contre le sien avec une rapidité telle qu'elle ne puisse réagir....D'un baiser il caline son oreille et lui souffle quelques mots:
Mais à vrai dire, je ne pensais pas vraiment à une table, pour assouvir cet appétit-là....
       
Se raidit, le repousse toujours délicatement, ses mains posées sur ses épaules. Le fixe du regard
Aïe...alors, j'ai bien peur que cela pose problème, messire Baron.

Avec une moue amusée, et des yeux allumés d'un désir ardent, lui répond, en prenant le temps de couvrir une de ses mains sur son épaule
Un problème? Quel problème?

Mathilde revint avec le fameux sanglier (la bête, pas le Baron).
Il ne grognait plus mais au contraire, le parfum qui s'exhalait du plat me mit l'eau à la bouche.

Il en fut de même pour le Baron, je pense. Du moins, les quantités qu'il avala me le firent croire.

Pendant le repas, il ne fut plus question ni de Beaumont ni de vin ni d'argent ni...de ce qu'espérait gagner Theognis de ma personne. Nous n'échangeâmes pas beaucoup de paroles, en fait. Il y eut quelques regards, oui. Les uns amusés, les autres gênés -les miens- et d'autres encore, énigmatiques et surtout, certains insistants.
Ceux-là me troublèrent, plus que je n'aurais voulu. De même que lorsque mes doigts effleurèrent ceux du Baron alors que lui et moi voulions attraper un morceau de pain, le petit frisson qui me parcourut me fit rougir.
Le vin servi en accompagnement, même s'il n'était pas aussi délicieux que celui de Beaumont, acheva de couronner ce repas qui ne fut pas si déplaisant que ça, bien au contraire.

Lorsque le dernier fruit fut mangé, la tension remonta...Il n'y avait plus ce prétexte à détourner notre attention, les plats vides signifiaient la reprise de...de quoi, au final ?

Je me levai, quittant la table et je regardai une série d'ouvrages reliés magnifiquement, sur une étagère.
Me tournant vers le Baron tout en indiquant les précieux livres, je lui demandai la permission d'un feuilleter un.

Puis-je ?

Mon regard croisa le sien et malgré moi, je lui souris.

Observation.

Une pièce exigüe, flanquée sur le mur du fond, d'une banquette recouverte de coussins rouges très confortables, une bibliothèque où sont rangés sagement de précieux ouvrages enviés par une jeune femme blonde et possédés par le Baron du lieu, une table qui devrait être de travail mais qui pour l'occasion s'est transformée en table de repas.
Deux personnes, déjà mentionnées, une jeune femme blonde, issue d'une ancienne famille noble de Bourgogne ayant pour des raisons obscures, perdu de son cliquant et dont la présente génération se bat pour obtenir terres, titres et reconnaissance ; un homme, sûr de lui, Baron ayant dans ses terres, le fief de Beaumont que convoite la famille de la Renarde Noire.
Et au-dessus de tout ça, une odeur de chasseur...chasseur de sanglier.
Ne sous-estimez pas le rôle de cette odeur et de ce qu'elle déclenche sur la jeune femme, vous commettriez une lourde erreur.

L'homme ne dédaigne pas le fait de bailler terres aux Renarts puisqu'il en tirerait profits. L'on peut voir aussi qu'il n'est pas insensible au charme de la belle et que le fait de la savoir chaste a éveillé chez lui, une attention particulière.
C'est lui qui détient les clés de cette rencontre, en sa seule décision.

La jeune femme tente de rester maîtresse de la situation ne voulant pas devenir la maîtresse du Baron.
Pourtant, si l'on est attentif, l'on peut voir quelques signes de trouble, trahissant l'effet de l'homme chasseur sur elle.
La Renarde Noire est vassale et amie protégée - nous pouvons le dire - de la plus titrée, la plus enviée aussi et sans doute la plus puissante Duchesse de Bourgogne.


Mais laissons-les, maintenant, sans entrer dans les pensées de l'un ou de l'autre, car, nul ne le peut.


De l'endroit précis où Theognis avait frôlé ma main, une délicieuse chaleur envahit progressivement mon corps tout entier, mes yeux s'ouvrirent un peu plus et ma lèvre inférieure se mit à trembler. Tremblement que je maîtrisai en mordant la traitresse.

Mes pensées se bousculèrent à toute allure, comme le font si bien les pensées contradictoires.
Mariage...il a dit "mariage" ?
Hmmm...c'est moi qui ai commencé !
Epouser Theognis...il est baron...Ca ne sonnerait pas mal, Della de Volvent - Montereau, Baronne...Oui, j'aime bien.
En plus, il n'est pas mal...et ces frissons qu'il déclenche...Della, enfin ! Il s'agit de mariage pas de luxure !
Grumph...
Mariage ??? Oderay, faut vraiment qu'on l'ait cette conversation à propos des moutons...au secours !!!
Mariage...Je dis oui !

Hop hop hop, reprendre contenance même si je ne peux empêcher un sourire trahissant un certain plaisir, illuminer mon regard.

Je suis à peu près certaine que s'il s'agit de mon avenir, sa Grâce Béatrice sera encline à vous entendre, Baron.
Qui plus est si cet entretien a pour but une union qui profiterait à chacun de nous.
S'il vous est plaisant de faire de moi votre épouse, sachez qu'il me serait agréable de prendre ce rang.
Autant que cela réjouisse chacun, n'est-ce pas ?
Autant vassal doit loyauté à son suzerain, autant épouse doit bien plus encore à son époux. Plus qui est rendu avec bonheur dans des conditions...agréables que nous pourrions rencontrer donc.

Fichtre, était-ce moi qui venait de parler ainsi ?
Etais-je en train de me marier moi-même ?
Vite...un rattrapage s'impose !

Mais j'outrepasse mes droits. J'espère que vous me pardonnez...Tout ceci sera de votre entrevue avec la Duchesse de Castelmaure.
Je baissai alors le regard, cherchant au bout de ma main, la trace encore brûlante du passage des lèvres du Baron.
Avait-il raison ? Etais-je déjà séduite ? Etait-ce ça la séduction, ce délicieux trouble qui me gagnait et cette envie de sourire...?

Theognis n'avait sans doute pas eu besoin de prodiges de devin pour sentir que j'étais extrêmement troublée par cette expérience que je faisais de le sentir si proche de moi.
Instinctivement, j'avais tenté de reculer pour me protéger de ma propre faiblesse mais je ne pus que prendre appui d'une main glissée dans mon dos, à la bibliothèque. Déjà, si la tête me tournait, je ne tomberais pas.
Et lorsque cette fois ses lèvres trouvèrent mon cou pour s'y poser, je fermai les yeux et ressentis au creux de mes reins, un picotement encore inconnu qui m'attira vers le Baron avec une envie quasiment irrépressible de me serrer contre lui et de lui laisser cueillir mes lèvres, ce que je crus réaliser l'espace d'un instant lorsque...il se reprit, me laissant avec une soif inassouvie.

Je sens bien votre envie de connaître les plaisirs défendus.
Bon, ça, c'était fait...Je rougis violemment et me promis de me confesser au plus tôt. Juste histoire de me donner bonne conscience face à ce combat qui se jouait au fond de mon être.

Mais ne craignez-vous pas que je sois grand jouisseur en la matière?
Que devais-je comprendre ? Que j'étais une oie blanche ? Que je ne saurais pas être satisfaisante ? Que...
Bigre ! De rouge, je passai au blanc, blanc colère qui gronde...Je serrai les doigts au creux de mes paumes, ravalant l'affront, regard rivé au sien.

Baron, si vous l'êtes tant, n'auriez-vous pas plaisir à mener une novice sur ce chemin d'apprentissage ? Un écuyer apprend à bien servir son chevalier...Une épouse peut apprendre à satisfaire son époux encore faut-il que celui-ci lui donne une chance de grandir dans cet art si particulier.

Theognis venait d'allumer en moi, une envie nouvelle, celle de séduire et d'être séduite, par lui. Je ne supportais pas seulement l'idée qu'il puisse douter de mon incapacité en la matière !
A moins que j'ai mal interprété ses paroles ? Oh, misère...si c'était le cas, je venais de me mettre dans de beaux draps.

Aussi, radoucie, avec une voix de miel, je continuai...posant ma main sur la sienne.
Mais je suis certaine que cette tâche ne serait pas une corvée...Me trompe-je ?

Au jeu du chat et de la souris, lequel des deux sera le plus habile ?

La tentation était si grande...Il me suffirait d'entrouvrir les lèvres et de croquer tendrement ce doigt qui faisait mine de vouloir les clore...La suit serait tout aussi envoutante, là-dessus au moins, je n'avais aucun doute.

Pour la première fois, je me trouvai en combat contre une partie de moi-même qui n'avait jusque là été que titillée sans vraiment la faire éclore, la féminité et son pouvoir de séduction. Des armes que je n'avais que trop peu utilisées et cette faiblesse allait me laisser sur le carreau, donnant la victoire de cette bataille au sanglier.
A cette pensée, une onde amère me traversa !
Qu'il m'envoie dormir comme un père envoie sa progéniture au lit pour finir la nuit vautré dans les plaisirs, me fit souffler de rage...avec discrétion bien entendu. Peut-être pas assez...

Je coulai un regard vers cette banquette et ses coussins accueillants, pris conscience de ma main dans celle du Baron, de cette occasion, peut-être unique, de satisfaire tous ces frémissements qui courraient le long de mon corps, de répondre à mon souffle devenu trop court et d'apaiser la chaleur qui montait jusqu'à mes tempes...me laissai aller à lever mon autre main, dans une intention de caresser le visage si proche du mien, d'en suivre chaque trait jusqu'à pouvoir le dessiner les yeux fermés mais stoppai le geste au dernier moment...Frustration !
Sans même avoir bouger un cil, Theognis prenait possession de ma volonté, lentement mais assurément et il me semblait aimer ça.

Avec quel plaisir je lui en aurais montrer, des preuves de mon dévouement, s'il s'était s'agit de notre nuit de noces...

Mais le Baron avait raison. Cela ne se décidait pas à la légère.
Au prix d'un violent effort donc et après un dernier sourire trahissant mon désir, je me dégageai doucement de l'emprise de l'homme, sortis ma main de la sienne et mis de façon prudente, la table entre lui et moi.

Les joues en feu, le coeur battant et les mains tremblantes, je risquai :

Soit, si telle est votre volonté de me voir me retirer, je le ferai.

Oui, mais doucement, j'étais là pour Beaumont, avant tout. Moi, mon corps et ses dilemmes et l'éventualité d'une union, on verrait plus tard, malheureusement.

Cependant, j'aimerais rentrer chez moi avant la tombée du jour, demain. Si vous pouviez songer à me consacrer encore un petit moment, afin de me rendre votre décision concernant Beaumont.
Je ne pus empêcher à nouveau un sourire et un regard sur le Baron. Regard et sourire doux, presque tendres, échos de l'émoi qu'il avait fait naître.
J'espère sincèrement que notre histoire ne s'arrêtera pas là.

Paroles à double sens...abandonnées au bon gré de celui qui les entend...

Si l'instant d'avant, je tentais de me rendre une contenance en me battant contre une chaleureuse vague de désirs encore inconnus, à cette seconde-là, j'en restais sur le séant (au figuré bien sûr, je restais bien debout même si vacillante).
Ma gorge se serra à en étouffer et je n'arrivai que péniblement à avaler une salive sèche et rare.
Je devais rêver. Oui, ça ne pouvait être autrement. Comment expliquer autrement cette demande totalement saugrenue et tellement irrévérencieuse ?

Certaines secondes peuvent paraître des ans et l'on rencontre parfois, dans notre existence, de tels moments de solitude que l'on aimerait devenir souris pour s'enfuir par le premier interstice venu.

Au bout de deux ou trois secondes-années donc, je tentai d'articuler quelque chose comme:

Mais...mais...mais Bar...Baron...Comm...comment puis-je vous...donn...donner cette...cette...cette ...preuve ? Et...quel...quel manque d'irrespecttotalenversune jeunefemmedelanoblessebourguignonne !

Alors cette fois, c'était clairement établi, il avait réussi à me déstabiliser, le sanglier ! Je pris une profonde inspiration et lançai illico :
Je suis outrée, Theog...je veux dire Baron ! Outrée et je prends ces paroles comme vexatoires et blessantes ! Vous êtes...un rustre !

Le dernier mot fut accompagné d'un "bong" résultat de mon poing qui venait de cogner la table.
A quoi donc jouait-il ? Etais-je devenue une bête à la foire aux bestiaux dont on reluquait les dents pour lui donner une valeur ?

Tant va la cruche à l'eau que la blonde sort de son onde...

Il avait beau rire, je ne décolérais pas...

Personne ne fera aucune vérification sur ma personne, Baron ! Ni vous ni Béatrice ni personne d'autre ! Je secouai la tête, cherchant à chasser les pensées contradictoires qui voulaient s'y nicher.
Je suis lasse...et la fatigue est mauvaise conseillère.

Le rustre avait raison, l'heure était venue de la séparation. L'air manquait à présent dans cette petite pièce et je commençais à m'y sentir à l'étroit. Pourtant, l'idée de m'enfermer dans une autre chambre, ici, à Arquian, ne m'enchantait guère non plus. Mais il faudrait s'y résoudre, pour ces terres de Beaumont.

Je tournai le dos au Baron en me dirigeant vers la porte.
La main sur la poignée, je lui lançai :
Bonne nuit, Baron. Je vous la souhaite de bons conseils.

En l'espace d'un court instant, je me retrouvai seule, dans un couloir sombre, sans avoir aucune idée de l'orientation à prendre mais hors de danger, loin du chasseur.

Beaumont valait-il tout cela ?
Dans quoi allais-je m'engager ? Quel serait le bénéfice à retirer de ces négociations ? Une terre...des vignes...un castel...
Tout cela était-il unique et tellement précieux ?
Qui se souciait de tout ça ? Des ancêtres qui avaient eux-mêmes dilapidés noms et biens ? Une famille qui portait un nom sans avoir rien d'autre à faire que d'arborer un blason ?
Est-ce que cette terre-là méritait tous ces sacrifices ?
Que ferais-je si Theognis exigeait un mariage ? Quelle serait ma prison ? Suffisait-il que son souffle caresse ma peau pour que j'oublie la véritable raison de cette éventuelle union ?

Je descendis deux volées d'escaliers qui n'étaient pas ceux que j'avais grimpés pour me rendre au bureau du Baron. J'avais du m'égarer.
Mais peu importait puisque arrivée en bas, je trouvai une porte qui me permit de sortir.
L'air était glacé...je respirai profondément, en fermant les yeux avant de les ouvrir sur un ciel étoilé.

Demain serait un autre jour...